La retraite en Mauritanie est pour beaucoup d’entre nous un moment de désenchantement. C’est une échéance redoutée, objet de hantise, comme un mauvais locataire qui craint les fins de mois, par ce qu’incapable de s’acquitter de son loyer. Ainsi après, une vingtaine d’années d’activité, la retraite se profilant à l’horizon, devient une préoccupation lancinante et encombrante ; au point de démotiver au travail.
L’imminence du départ à la retraite n’est pas sans créer frustration et aigreur, notamment chez les esprits les plus faibles et moins résilients, jusqu’à empoisonner l’environnement professionnel. Et pourtant, le départ à la retraite n’intervient pas comme un invité surprise. Si chacun connaît la date de son engagement, il est censé savoir conformément à la législation en vigueur, à partir de quelle date, il doit rendre le tablier.
La retraite est donc traumatisante. Alors pourquoi créer du traumatisme chez des personnes qui ont pour la plupart servi la nation avec loyauté, intégrité, probité et fidélité ? C’est sans doute de l’ingratitude . Un manque de reconnaissance.
Mais, la retraite attend patiemment et douloureusement chacun d’entre nous. Celui qui s’empresse lâchement à occuper le fauteuil de son aîné, admis à faire prévaloir ses droits à la retraite subira le même sort.
En juillet 2020, le président de la République, Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani a fait passer l’âge de départ de 60 à 63 ans. Une mesure qui a permis de « laisser en vie » de nombreux fonctionnaires : 36 mois, c’est insuffisant. Ils sont vite rattrapés par la réalité de la vie. D’autant plus que chez nous, la retraite n’est pas seulement synonyme de dèche, de vie en hibernation, c’est beaucoup plus dramatique.
L’un de mes doyens qualifie avec humour, la retraite de maltraitance en jouant avec la similitude phonétique, entre retraité et maltraité. Elle est accompagnée d’une déchéance à tous égards : économique, sociale, professionnelle et même intellectuelle. Si bien que le retraité perd tous ses avantages : titres, médailles et distinctions, s’il n’est pas effacé des photos et logiciels officiels.
Voilà des pratiques qu’il faut changer. En effet, une société qui envoie dans les oubliettes les anciens, ne peut aller de l’avant. Le passage de témoin générationnel est fondamental pour que la jeunesse soit préparée à relever les défis, être au top pour aborder sereinement l’avenir .
Mais pour ce faire, il faut valoriser la retraite pour qu’elle n’inspire plus crainte et descente aux enfers. Ainsi, ce n’est pas l’âge de départ à la retraite qui importe. Donner un sens au travail, c’est la seule solution véritable pour que celui qui a passé toute une vie à se réveiller tôt, soit heureux et rétribué à la hauteur de ses efforts.
Les autorités doivent oser engager des réformes en profondeur de notre système de retraite qui est caduc et obsolète afin que la retraite soit une consécration, une heure de gloire : un départ dans l’honneur.
En France, l’âge de départ à la retraite va passer de 62 ans à 64 ans, paradoxalement la mesure crée mécontentement et colère. Les Français s’empressent d’aller à la retraite pour se reposer . C’est parce que le retraité Français est loin de mener une vie de misère. Le retraité est bien traité. Voilà la différence.
Si nous travaillons pour mieux vivre et ainsi assurer une meilleure réussite sociale, la retraite qui est indissociable du travail doit être source d’aisance, de quiétude, de luxe et volupté, loin du spleen et de la déprime.
Il revient à ceux qui sont au pouvoir, aujourd’hui de prendre une décision courageuse pour que la retraite ne soit plus un rendez-vous manqué.
Demain, ce sera trop tard !
Seyré SIDIBÉ